« Le populisme est le plus dangereux des narcotiques, le plus puissant des opiums pour endormir et anéantir l’intelligence, la culture, la patience et l’effort conceptuel». C’est l’écrivain français Michel Onfray qui l’affirmait. Le populisme, en effet, même s’il prospère pendant un temps, ne tient pas, pour autant, sur la durée.Car, comme le disait si bien Lincoln, « on ne peut pas tromper tout le peuple, tout le temps ». Le futur ex-président américain, Donald Trump et l’ex-chef d’Etat ivoirien, Laurent Gbagbo, sont deux exemples patents de cette leçon de vie politique.
L’un comme l’autre, Trump et Gbagbo ont choisi de faire du populisme leur philosophie politique et leur arme favorite, pour haranguer leurs partisans et s’assurer un soutien indéfectible, souvent fanatique. Sous les feux de l’actualité, Donald Trump fait aujourd’hui les frais de son populisme outrancier et surtout de sa gestion scabreuse de la première puissance économique et militaire du monde : les Etats-Unis d’Amérique. Vainqueur surprise du scrutin, alors que tous les sondages le donnaient perdant, face à la candidate démocrate Hillary Clinton, en 2016, Donald Trump fut pendant son mandat le Président le plus controversé de son pays. Iconoclaste, peu raffiné et prompt à injurier ses détracteurs à la moindre contrariété, il a désacralisé la fonction de chef de l’Etat, ternissant, à souhait, l’image de son pays. Avec des prises de décisions, qui relèvent bien souvent plus de sautes d’humeur que d’une réelle réflexion approfondie. Comme un certain Laurent Gbagbo l’avait fait, durant une décennie, avec la Côte d’Ivoire. Mais, ce qui a surtout coulé Donald Trump, ce n’est pas que tant sa truculence et ses discours incendiaires, c’est plutôt sa gouvernance désastreuse axée sur la division des Américains. Au lieu de fédérer la Nation, il s’est échiné à contenter son clan, l’Amérique conservatrice, au détriment des autres citoyens de son pays. Il a travaillé à satisfaire essentiellement ses partisans, sans se préoccuper du reste des Américains. Même pendant les heures chaudes de la révolte populaire contre les violences policières inexplicables, Trump n’a pas su prendre la distance nécessaire avec sa « tribu » pour se glisser dans la peau du « Président de tous les Américains ». Aucune compassion pour les victimes, aucun réconfort pour leurs familles respectives, aucune condamnation des auteurs des exactions et crimes, aucun mot pour apaiser les cœurs des manifestants. Cette gestion hasardeuse des affaires de l’Etat n’est pas sans rappeler une période récente de la Côte d’Ivoire. Avec un Laurent Gbagbo, ivoiritaire et xénophobe à souhait, qui saluait les tueries des miliciens à sa solde par le « mille morts à gauche, mille morts à droite, moi j’avance ». La Côte d’Ivoire connaissait un repli identitaire sans précédent, ses relations avec ses voisins et la communauté internationale étaient au plus bas, sinon inexistantes. La défaite cuisante de Trump dans les urnes face à son challenger démocrate est la résultante logique de cette politique incongrue axée sur le populisme et la démagogie. Quand on gouverne pour une partie du peuple, contre l’autre partie, on le paie indubitablement cash. C’est l’amère expérience que vit Trump actuellement. Mauvais perdant, à l’instar de Gbagbo en 2010, il refuse de reconnaître sa déconvenue électorale, pourtant évidente, au regard de l’avance nette de Joe Biden (290 grands électeurs contre 214 pour lui ) et offre un triste spectacle au monde entier : celui d’un homme vaincu, qui porte des accusations de fraudes massives… sans aucune preuve. Et qui s’accroche, mince espoir de survie, à la justice ou au recomptage des voix pour espérer inverser une tendance…irréversible. Donald Trump refuse une sortie honorable de la Maison Blanche, comme un certain Gbagbo qui a été tiré de force de son bunker présidentiel dans lequel il s’était retranché, avec son cercle des dernières fidèles, refusant de reconnaitre le décret populaire. Quoiqu’il fasse, c’est un combat perdu d’avance pour le prochain ex-locataire de la Maison Blanche. Donald Trump, qui paie cash ses turpitudes, quittera le 20 janvier prochain la Présidence des Etats-Unis d’Amérique, par la petite porte. L’histoire retiendra qu’il fut tout sauf un grand Président. A l’instar de Laurent Gbagbo, en Côte d’Ivoire, dont le passage à la tête de ce pays, restera, à jamais, une parenthèse douloureuse. Avec Joe Biden, « une nouvelle ère d’espoir », comme l’a souligné sa vice-présidente Kamala Harris, s’ouvre pour les EtatsUnis. Le pays va retrouver son aura et l’influence, qui ont bâti sa réputation dans le monde. C’est la très bonne nouvelle de cette élection présidentielle américaine. Espérons que Biden arrive rapidement à relever les Etats-Unis comme Alassane Ouattara a fait l’exploit de remettre la Côte d’Ivoire sur le chemin du développement en si peu de temps après la parenthèse du gbagboisme triomphant.
PAR CHARLES SANGA