La décision du gouvernement – rendue publique à l’issue du conseil des ministres du mercredi 28 septembre dernier-, de contraindre les populations, du moins celles qui traînent encore les pas, à s’enrôler pour la CMU (Couverture maladie universelle), agite l’opinion. Et on assiste, force est de le reconnaître, à une levée de boucliers de certaines personnes contre cette mesure qui renforce – puisqu’elle l’était déjà- le caractère obligatoire de la CMU. Sans, pour la plupart d’entre elles, avoir fait une analyse profonde de la décision, encore moins de la CMU, qui cristallise cette agitation. De quoi s’agit-il ?
Face à la problématique de la couverture sanitaire, pour une grande frange de la population ivoirienne, l’Etat de Côte d’Ivoire a décidé de mettre en place une Couverture maladie universelle. Ainsi, l’enrôlement à cette CMU permet – on ne le souligne pas assez – aux souscripteurs de bénéficier, contre une cotisation mensuelle de 1000 FCFA, de soins à moindre coût dans un certain nombre d’hôpitaux conventionnés avec un ticket modérateur de 30%. En clair, l’assuré paie le tiers du montant de la facture médicale et l’Etat s’occupe des deux tiers restants. Et surtout, il peut acheter les médicaments à des coûts relativement bas. L’opération d’enrôlement pour la délivrance des cartes CMU a été lancée le 30 novembre 2014, avec un objectif à court terme de 4 millions d’enrôlés pour une première phase test. Mais, curieusement, jusqu’à ce jour, soit près de 8 ans après, il n’y a «que» 3,5 millions d’enrôlés. Ce qui constitue une broutille sur une population estimée à environ à 30 millions d’habitants. Ce très, ou trop, faible nombre d’assurés CMU témoigne, avec acuité, du désintérêt total des Ivoiriens pour cette initiative, pourtant très noble, car elle vise, in fine, à permettre à une grande frange de la population d’avoir accès aux soins de santé. En dépit de leurs faibles revenus. Une situation totalement incompréhensible comme on en voit souvent en Côte d’Ivoire. L’Ivoirien, c’est connu, ne prend rien au sérieux, s’amuse avec tout et de tout. Un Etat qui se respecte doit-il rester indifférent face une telle négligence aussi suicidaire ? La réponse est évidemment non. C’est pourquoi, le gouvernement a décidé que désormais pour avoir accès à certains services de l’Etat, aux emplois publics et privés, il faudra fournir la preuve de son enrôlement à cette assurance. Une vraie piqûre de rappel qui tombe à pic, car s’il y a un langage que l’Ivoirien comprend vite, c’est celui de la contrainte. N’en déplaise à tous ceux qui s’agitent sans apporter la preuve réelle que la CMU n’est pas utile. D’ailleurs, savent-ils que dans ce pays, beaucoup de gens vivent, faute de moyens, sans aucune assurance. Ont-ils conscience du calvaire que vivent les malades, sans couverture sociale, et leurs parents pour faire face aux ordonnances et autres soins médicaux. Des personnes sont contraintes, souvent, de s’endetter ou de vendre leurs biens pour acheter des médicaments ou faire un examen médical ? Il est temps qu’on arrête de s’opposer… pour s’opposer. Et de tout voir sous le prisme déformant de la manipulation politique. La CMU que le gouvernement a mis en place n’est pas destinée à une catégorie d’Ivoiriens encore moins à des partisans d’un parti politique. C’est à tous les Ivoiriens, riches ou pauvres, bleus ou verts, qu’elle est destinée. Qu’on le veuille ou non, elle est éminemment utile aux populations. « C’est ça qui est la vérité », pour paraphraser un titre à succès du célèbre groupe zouglou Magic System. Tout le reste n’est que superfétatoire.
Y. Sangaré